Affaire Enquêtes criminelles
Le 2
mars 2011, a été diffusée sur la chaîne de télévision W9 (groupe M6), l'émission
"Enquêtes criminelles". L’émission
relate des affaires judiciaires sous la forme d'interviews des
protagonistes judiciaires et journalistiques de l'époque avec utilisation
d'images d'archives mais aussi de scènes tournées pour l'émission. A cette occasion
avait été diffusé le documentaire "Virée
criminelle", produit par la société CAP A PRESSE retraçant
l'affaire dite des "Paras de Francazal" dans
laquelle quatre parachutistes affectés à la base aérienne de Toulouse-Francazal
ont été condamnés en avril 1991 par la cour d'assises de Toulouse à la réclusion
criminelle à perpétuité pour viols et meurtres avec actes de barbarie.
Ce
documentaire était suivi d'un court débat permettant de donner la parole à
l'avocat de l'une des victimes en empruntant des images d'archives et en
donnant la parole aux enquêteurs, aux avocats ainsi qu'aux journalistes ayant
suivi l'affaire. Le documentaire utilise certains procédés empruntés à la
narration mélodramatique (musique angoissante, suspense...), entraînant ce
mélange des genres que l'on nomme "docufiction".
Droit à l’image contre
droit à l’information
Suite
à la diffusion du documentaire, l’un des condamnés, âgé de 19 ans à l'époque
des faits, a fait citer sans succès, la SA MÉTROPOLE TÉLÉVISION et la SAS CAPA
PRESSE pour atteinte à son droit à l’image et au respect de sa vie privée.
Aucune
image du condamné en détention n'apparaissant dans le reportage, l'article 41
de la loi du 24 novembre 2009 n’était pas applicable. Cet article dispose que :
« Les personnes détenues doivent
consentir par écrit à la diffusion ou à l'utilisation de leur image ou de leur
voix lorsque cette diffusion ou cette utilisation est de nature à permettre
leur identification. L'administration pénitentiaire peut s'opposer à la
diffusion ou à l'utilisation de l'image ou de la voix d'une personne condamnée,
dès lors que cette diffusion ou cette utilisation est de nature à permettre son
identification et que cette restriction s'avère nécessaire à la sauvegarde de
l'ordre public, à la prévention des infractions, à la protection des droits des
victimes ou de ceux des tiers ainsi qu'à la réinsertion de la personne
concernée. Pour les prévenus, la diffusion et l'utilisation de leur image ou de
leur voix sont autorisées par l'autorité judiciaire ». Ces dispositions légales ne s'appliquent
qu'aux images qui représentent des personnes, prévenues ou condamnées, en
situation de détention et n'ont pas vocation à créer au profit de celles-ci,
s'agissant de leur image captée en dehors du contexte pénitentiaire, une
protection supérieure à celle qui est accordée à toute personne au moyen de
l'article 9 du code civil.
S'agissant
de la protection instaurée par l'article 9 du code civil, les droits à l'image
et à l'utilisation qui en est faite doivent se concilier avec le droit à la
liberté d'expression, consacré par l'article 10 de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales; ils peuvent
céder devant la liberté d'informer, par le texte et par la représentation iconographique, sur tout ce qui entre dans le
champ de l'intérêt légitime du public, certains événements d'actualité ou
sujets d'intérêt général pouvant justifier une publication en raison du droit
du public à l'information et du principe de la liberté d'expression.
Dans
ces conditions, les droits au respect du droit à l'image et à la liberté
d'expression revêtant, au regard des articles 8 et 10 de la Convention
européenne et 9 du code civil, une identique valeur normative, il appartient au
juge saisi de rechercher leur équilibre et, le cas échéant, de privilégier la
solution la plus protectrice de l'intérêt le plus légitime.
Dans
le documentaire "Virée
criminelle", l'image du détenu apparaissait soit au moyen de
photographies identitaires prises dans le cadre de ses fonctions de militaire,
soit sur les clichés et films pris lors du procès d'assises. Ces documents datant de l'époque des faits
constituaient une illustration pertinente du propos du réalisateur lequel
traite d'un sujet d'intérêt général, s'agissant de relater une affaire
judiciaire ayant à l'époque pris le caractère d'un événement public comme le
démontraient les articles de presse versés aux débats, la particulière gravité
des faits multiples ayant contribué à relancer le débat sur la peine de mort
abolie 10 ans auparavant.
Par
ailleurs, cette affaire interpellait sur l'attitude de l'armée confrontée à une
enquête policière puis judiciaire susceptible d'investiguer à l'intérieur de
l'institution militaire.
Enfin,
les images du condamné apparaissant à l'écran n’étaient pas attentatoires à sa
dignité, étant relevé qu'elles soulignaient sa grande jeunesse à l'époque des
faits, ce qui est susceptible de constituer une circonstance atténuante et de
contribuer à instaurer une distance avec la situation actuelle du demandeur (lequel
soutenait à raison qu'il avait fait un travail considérable sur lui-même
pendant ces deux décennies de détention) (Source : Actoba.com).
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